La séance est présentée par Bernard Eisenschitz*.
1933 - 2h - Sonore
Allemagne
Réalisation : Fritz Lang
Scénario : Thea von Harbou, Fritz Lang, d’après le roman Dr. Mabuses letztes Spiel de Norbert Jacques
Photographie : Karl Vass, Fritz Arno Wagner
Production : Nero-Film AG (Berlin)
Avec : Rudolf Klein-Rogge, Oskar Beregi Sr., Theodor Loos, Otto Wernicke, Klaus Pohl, Wera Liessem, Gustav Diessl, Camilla Spira, Rudolf Schündler, Theo Lingen
Le Dr Mabuse dirige, de l’asile psychiatrique où il est interné, un gang de malfaiteurs et le docteur Baum, directeur de l’établissement, grâce à ses pouvoirs hypnotiques. Le commissaire Karl Lehmann et le bandit repenti Kent parviendront après nombre de rebondissements à démanteler le réseau.
« Fritz Lang s'intéressait de près à l'actualité de la vie publique. Pour lui, la bêtise en politique allait de pair avec la cruauté humaine, et il vivait les deux comme une agression personnelle. Ses dernières années ont été marquées par l'effroi que lui inspirait la violence galopante de notre monde.
Lorsque nous vivions à Berlin, Fritz faisait partie, comme moi, des gens de gauche. Malgré toutes les tentatives de Hans Feld pour me convaincre du contraire, je crois Lang lorsqu'il affirme avoir voulu dénoncer la propagande et la mentalité des nazis dans le dernier film qui tourna en Allemagne avant la guerre, Le Testament du docteur Mabuse, sans prendre garde au danger que cela pouvait représenter pour lui. Certes, à cette période, Lang était un demi-dieu à la UFA, le public et la presse étaient à ses pieds mais ses opinions politiques et surtout ses origines – sa mère était une Schlesinger – le mettait en position de fragilité. Metropolis et Les Nibelungen avaient beaucoup plu à Hitler, mais un silence plus que gêné suivit la projection du Testament, interrompu par l'acclamation enthousiaste du fils de Goebbels.
-Extra, ce film !
-Ferme-la !, lui ordonna son père. »
Mémoires de Lotte H. Eisner, J'avais jadis une belle patrie, Edition Marest, 2022, p. 141-142
« Avec LE TESTAMENT DU DR MABUSE (1933) les procédés sonores de Lang évoluent de plus en plus. Dans l’usine des faux-monnayeurs les machines grondent et dans ce bruit infernal, tandis que les objets s’entrechoquent, vibrent sous le balancement de la lampe – l’image étayant ainsi tout naturellement le son –, Hofmeister, l’ex-détective, doit, pour ne pas devenir fou, se boucher les oreilles. Quand les deux employés découvrent la présence de l’intrus, leurs chuchotements se perdent dans le vacarme. Mieux encore, quand les deux amoureux sont enfermés dans la pièce coupée par un rideau nous entendons avec eux – ce qui relève la tension de la scène – l’insupportable bruit, les pulsations de la machine infernale. »
L’Écran démoniaque, Lotte H. Eisner, Paris, Ed. Ramsay, 1985, p. 228-229
Format de la copie : DCP
*Historien du cinéma, critique et programmateur, Bernard Eisenschitz est également l'auteur de Roman américain, Les Vies de Nicholas Ray (1990), Man Hunt de Fritz Lang (1992), Fritz Lang la mise en scène (dir.,1993), Gels et Dégels, Une autre histoire du cinéma soviétique, 1926-1968 (dir., 2000) et Le Cinéma allemand (1999, 2008).