La Fondation Jérôme Seydoux – Pathé est partenaire pour la 8e année du festival international du film restauré « Toute la mémoire du monde » organisé par la Cinémathèque française. Pour cette 10e édition, la programmation se concentre sur le week-end des 11 et 12 mars avec la présentation de cinq séances de films restaurés.
Tout d'abord deux films réalisés par Jean Epstein dans la veine documentaire : La Montagne infidèle et Artères de France. Le premier, restauré par la Filmoteca de Catalunya à partir d'une copie unique 28 mm, témoigne de la spectaculaire témérité du cinéaste et de son opérateur Paul Richard, envoyés pour les Actualités Pathé sur les versants de l'Etna filmer son éruption en 1923. Le second, film sonore tourné en 1939, est un documentaire sur les grandes voies de communication françaises, commande du Ministère du Commerce.
Autre film documentaire, composé essentiellement d'images d'archives, Land of Nairi est réalisé par le cinéaste arménien Bek-Nazarian en 1930. Le film offre un panorama historique de la transition de l'Arménie d'une colonie russe à une république soviétique à travers une vision poétique, voire surréaliste, et une puissance du langage cinématographique qui n'est pas sans rappeler l'œuvre de Dziga Vertov et qui annonce celle d'Artavazd Pelechyan.
La Friedrich-Wilhelm-Murnau-Stiftung propose une restauration de Manolesco, prince des sleepings de Victor Tourjanski (1929), film résolument poignant et mélancolique narrant les aventures du célèbre brigand Belle Époque. Le magnétisme d'Ivan Mosjoukine y côtoie la prestance graphique de Brigitte Helm et la délicatesse Dita Parlo, un trio fascinant…
La frêle silhouette de Nadia Sibirskaïa, qui illumine la période muette de Dimitri Kirsanoff, est prégnante dans deux nouvelles restaurations menées par Lobster Film et la Cinémathèque française : Ménilmontant (1929), film dans lequel Kirsanoff excelle dans la mise en scène de la confusion des sentiments, portrait intemporel d'une jeune femme et d'un quartier, et Brumes d'automne (1928), ou la peinture d'un amour languissant.
Enfin, la Fondation Pathé propose un ciné-concert exceptionnel. Le Nabab d'Albert Capellani (1913), restauré par la Fondation en 2021, est présenté sur une musique originale composée et interprétée par Bruno Angelini au piano, Vincent Courtois au violoncelle et Catherine Delaunay à la clarinette. Réalisé entre ses deux œuvres majestueuses, Les Misérables et Germinal, Le Nabab porte magistralement à l'écran l'œuvre d'Alphonse Daudet en insistant sur la description typologique des milieux sociaux dans lesquels évoluent les personnages. Les interprétations de Léon Bernard, sociétaire de la Comédie-Française, Jean Dax et Pierre Larquey sont prodigieuses et Capellani exploite ici le tournage en extérieurs et une succession de décors somptueux qui soulignent l'opposition entre la ville et la campagne.
Ces séances permettent de découvrir ou revoir en ciné-concert des œuvres variées et saisissantes, nouvellement restaurées par les cinémathèques et archives internationales, et de rendre hommage à la puissance créative du cinéma muet.